vendredi 5 décembre 2014

La chute des maîtres du Portugal

Depuis l'été dernier, les mises en examen pour corruption et blanchiment se succèdent aux plus hauts degrés de l'Etat portugais.

Les portes de la prison pour VIP d'Evora se sont ouvertes le 25 novembre 2014 pour laisser entrer l'ancien Premier ministre du Portugal José Socrates, au pouvoir de 2005 à 2011. 
L'établissement a également accueilli la semaine dernière le chef de la police des frontières du pays et, quelques mois auparavant, Armando Vara, l'ancien ministre adjoint.
La détention provisoire de Socrates a été appliquée quatre mois après la libération conditionnelle de Ricardo Salgado [ex-président de la Banco Espírito Santo (BES)].
Elles ont été toutes deux décrétées par le même juge et les deux hommes sont accusés des mêmes délits : fraude fiscale et blanchiment. 

L'un est le politicien qui a dirigé le pays avec la majorité absolue de 2005 à 2009, l'autre était le 'premier banquier', l'administrateur de la famille la plus influente du pays, les Espírito Santo.


L'ère Socrates : "Une époque terrifiante" 
Les symboles de ces temps heureux sont tombés en quatre mois. "Le pays était joyeux, tout était merveilleux, il y avait du travail pour tout le monde", se souvient l'économiste João Duque. Ces cinq années de luxe ont commencé avec l'obtention de la majorité absolue par le socialiste. "Socrates était le grand promoteur et Salgado le grand banquier. Il y avait là une réunion d'intérêts qui bénéficiait aux deux parties", poursuit Duque. 
"Le pays a vécu une époque terrifiante", explique Jose António Saraiva, directeur de l'hebdomadaire Sol, que Socrates a essayé de fermer. "Socrates avait réuni cinq pouvoirs dans ses mains, une configuration sans précédent dans une démocratie européenne : le Parlement, le gouvernement, les médias (endettés auprès de la banque) la justice et la banque.

Une entente parfaite entre le banquier et le politique 
Le premier gouvernement de Socrates a lancé d'importants travaux publics, qu'il a fallu financer. "La BES et d'autres banques lui ont prêté l'argent nécessaire parce que le rendement était bon et qu'elles avaient les garanties de l'Etat", explique João Duque. 
Socrates démissionne en mars 2011 et remet les clés du pays aux fonctionnaires de la troïka (FMI, BCE et CE) qui dirigent le sauvetage économique du pays. Il emporte avec lui la réputation acquise dans ces années heureuses ; ceux qui lui succèdent héritent de la facture.

Suspicions de blanchiment depuis dix-sept ans
Le directeur du Sol se souvient de ses déjeuners avec lui. "C'était un menteur pathologique », raconte-t-il.
Socrates flirtait avec les suspicions de blanchiment et de trafic d'influence depuis dix-sept ans. Même son diplôme d'ingénieur, obtenu à presque 40 ans, soulevait des soupçons tout à fait fondés.

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